Aujourd’hui, la plupart des entreprises sont confrontées, ou le seront bientôt, à la question du risque de change. C’est une tendance forte, liée à l’accélération de la mondialisation et au développement du commerce par Internet. Cette situation amène aujourd’hui toutes les entreprises, même les plus petites, à s’imbriquer dans des échanges internationaux. Ainsi, les échanges de marchandises ont représenté 15 460 milliards de dollars en 2016. Les échanges de services, 4 770 milliards, selon le rapport annuel de l’OMC de 2017.
La gestion du risque de change, un enjeu majeur pour les entreprises
Le commerce international n’est pas une activité facile. Les risques sont nombreux et, comme l’a très justement dit Emile de Girardin, « Gouverner c’est prévoir ». Il est donc du devoir du chef d’entreprise d’anticiper les nombreux risques liés à l’internationalisation de son activité, y compris un risque particulièrement difficile à appréhender car il est jugé élitiste, cher et difficilement maîtrisable : le risque de change.
Comprendre la gestion du risque de change
Qu’est-ce que le risque de change ? Ou plutôt devrions-nous dire les risques de change ? Car, comme nous le verrons ultérieurement, il existe plusieurs risques liés aux changes des devises. Les cours des devises, comme ceux des actions en Bourse, sont volatiles. C’est cette volatilité qui peut être gravement pénalisante pour une entreprise.
Il convient donc d’avoir une gestion des risques de change bien planifiée et bien exécutée. La gestion des risques de change englobe l’ensemble des mesures prises pour limiter au maximum les impacts de la volatilité des devises sur les résultats de l’entreprise. La gestion des risques de change va ainsi permettre aux exportateurs et aux importateurs d’être plus compétitifs, d’améliorer leurs marges et de mieux anticiper leurs flux de trésorerie attendus (cash flow).
Cette question de la gestion du risque de change est donc cruciale. Elle représente autant un risque si on la délaisse, qu’une opportunité d’amélioration du compte de résultat si l’on sait s’en saisir. On peut regretter que bon nombre de chefs d’entreprises ne mesurent pas suffisamment l’impact réel du risque de change. En outre, seule une minime partie du risque de change apparaît dans le compte de résultat.
Un risque énorme pour les PME
Toute entreprise, qui règle ou reçoit des règlements en devises étrangères, a une exposition aux risques de change. Ce risque concerne aussi de nombreuses autres structures clés de notre quotidien : associations, ONG, ministères et autres organismes étatiques.
Les grandes entreprises sont plus enclines à gérer le risque de change car elles peuvent disposer de moyens humains et financiers à allouer à la gestion de ce risque. Paradoxalement, les PME se sentent moins concernées alors qu’elles sont tout aussi exposées. D’autant plus que le risque est pour elles beaucoup plus dangereux. En effet, la grande différence dans ce domaine entre une grande et une petite entreprise, c’est que, en cas de mauvaise gestion du risque de change, la grande entreprise a de fortes chances de passer le cap, alors que la PME risque fort de ne pas s’en remettre. Le rôle des conseils de l’entreprise est donc d’alerter sur ce risque, et de proposer des procédures efficaces de gestion du risque de change.
Avoir une vision globale de l’entreprise
La personne en charge de la gestion du risque de change doit avoir un poste lui permettant d’avoir une vue générale de l’entreprise, sachant que la durée de l’exposition aux risques de change est égale à celle du cycle d’exploitation. Penser que le risque de change commence à l’enregistrement de la facture est l’une des premières erreurs. En effet, ce risque commence dès la fixation d’un taux de référence (cours budget) qui impacte directement le prix annoncé au client. La vision de l’horizon temps est donc primordiale. Elle est certes l’apanage du chef d’entreprise, mais celui-ci peut en déléguer la gestion. Dans tous les cas la communication entre tous les services est primordiale être efficace.
Malheureusement, le risque de change est le plus souvent minimisé ou complètement méconnu. D’ailleurs le chef d’entreprise tend à le déléguer à la mauvaise personne. C’est-à-dire à une personne qui ne dispose ni de la compréhension des enjeux ni des outils nécessaires. En effet, si 78 % des entreprises internationales certifient mettre en place une politique de change, 50 % reconnaissent ne pas avoir de stratégie de change bien définie !
Insuffisance de la comptabilité pour rendre compte de la réalité
Il faut avant tout comprendre qu’en matière de gestion du risque de change, les écritures comptables ne sont que la partie visible de l’iceberg. L’écart de change enregistré en comptabilité (comptes 666 ou 766) à la suite du paiement de la facture et la provision pour risque de change ne sont pas suffisamment significatifs pour savoir si la politique de change est bonne ou non, pas plus qu’ils n’indiquent l’impact financier réel.
Par exemple, nous savons que dépend du prix de revient le prix d’achat des matières premières et que ce prix de revient à un impact direct sur le résultat. En comptabilité nous prenons en compte la variation entre l’enregistrement de la facture et son paiement. Par contre, la variation du taux de change entre les négociations, la signature du devis et la réception de la facture n’est pas prise en compte. Il en est de même pour le prix de vente final apparaissant dans le catalogue qui n’a pas changé. On voit bien, dans cet exemple simpliste, que les dommages que causent les taux de change ne transparaissent guère à travers les comptes, ils sont plutôt cachés. C’est pourquoi ils sont donc trop rarement pris en compte.
La gestion du risque de change étant considérée comme complexe, technique et difficilement maîtrisable, ce sujet est peu abordé dans les PME. Ce qui renforce la tendance à sous-estimer ce risque. Pourtant en adoptant une bonne méthode, de bons outils ou l’externalisation, le pilotage de ce risque peut être mis sous contrôle.
Les objectifs recherchés d’une bonne stratégie de change
Objectif n° 1 : neutraliser l’impact des variations des devises sur les marges commerciales. La principale raison pour laquelle il est important de mettre en place une stratégie de change est pragmatique. Elle permet d’atténuer l’effet négatif des fluctuations du taux de change sur les achats ou les ventes en devises étrangères.
Objectif n° 2 : immuniser l’entreprise contre la spéculation sur les taux de change. Suivre les marchés financiers est un métier complexe qui n’est pas celui du chef d’entreprise. Le temps qu’il passe à suivre le Forex, c’est du temps en moins consacré au développement de son activité. D’autant que le marché des devises est le marché dont les fluctuations sont les plus difficiles à anticiper.
Objectif n° 3 : anticiper les entrées et sorties de trésorerie liées aux achats de devises. En éliminant l’incertitude, il est plus facile de prévoir les budgets et donc la trésorerie
Objectif n° 4 : obtenir de meilleurs taux de change. En étant confronté au sujet, le chef d’entreprise améliore sa connaissance. Ce qui lui permet de reprendre le pouvoir face aux banques pour négocier de meilleurs taux.
Comment mettre en place une stratégie optimale ?
Une fois ces objectifs assimilés, il faut mettre en place la méthode correspondant au mieux à l’activité de l’entreprise. Il n’existe pas de méthode unique : la gestion du risque de change doit donc s’adaptée au profil de l’entreprise. De plus, la gestion du risque de change est un processus dynamique. Il faut donc garder un oeil attentif sur l’évolution de ses besoins et des évolutions aussi bien du marché que de son activité.
On peut alors actionner différents leviers par ordre de priorité : mettre en place de méthodes pilotage à travers des outils, accéder à des instruments de couverture et obtenir de meilleurs taux de change. En actionnant ces trois leviers, l’entreprise disposera de réels moyens d’action.
Le rôle de l’expert-comptable
De façon très pratique maintenant, il est important pour l’expert-comptable d’échanger avec son client sur le risque de change. Il doit lui exposer les conséquences potentielles d’une non-prise en compte du risque de change. Car, contrairement à ce que pensent bon nombre de chefs d’entreprises actifs à l’international, prendre le risque de subir des pertes de change ne peut être considéré comme un « petit risque ».
Par ailleurs, obtenir de meilleurs taux de change et utiliser des instruments de couverture nécessitent une aide externe. Afin de définir la méthode la plus adaptée, il est indispensable que le dirigeant identifie ses besoins. Il doit s’ouvrir à des avis d’experts indépendants, pour mesurer son exposition et mettre en place une stratégie optimale
L’article « Gestion du risque de change : les experts comptables en première ligne » a été rédigé par Sébastien OUM et Adrien PERTHAME pour l’édition 520 de la Revue Française de Comptabilité.
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